Le récit d'un destin. Celui de Suzanne et des siens. Les liens qui les unissent, les retiennent et l'amour qu’elle poursuit jusqu'à tout abandonner derrière elle...
Ou vingt ans de la vie d’une femme qui ne voulait pas être ordinaire. Suzanne semble destinée à la vie modeste et sans ambition à laquelle semble s’être résignée sa sœur aînée Maria. Mais elle a la rage de vouloir échapper à ce déterminisme social qui rétrécit les rêves et les ambitions jusqu’à les faire disparaître dans la plus déprimante des routines. Bien sûr, Katel Quillevéré (la jeune femme a du talent et il faudra s’habituer à ce nom insolite) s’est surtout intéressée au cheminement chaotique de la vie de Sara, mais si Nicolas, le père, et Maria, la sœur, sont en retrait, la réalisatrice ne leur porte pas moins un regard attentif. (On y reviendra). Procédant par des ellipses et des raccourcis très maîtrisés, elle nous oppose 2 portraits de femmes si différentes et pourtant si fusionnelles. Comme si elles étaient l’une pour l’autre un refuge, un îlot de tendresse et de sécurité. Pas de jugement, pas de regard insistant, seulement une attention qui accompagne dans les virages les plus inattendus (et dans la vie de Suzanne, ce ne sont pas les coups de théâtre qui manquent). Suzanne amplifie les classiques ruptures de l’adolescence jusqu’à des engagements et des choix irréfléchis qui remettent toute sa vie en question, laissant à l’inattendu, au passionnel, le soin de la diriger. Souvent pour le pire, mais aussi sans regret. Sara Forestier joue comme à l’accoutumée avec tantôt la fougue, tantôt la mélancolie qui rendent son personnage à la fois sympathique et inquiétant. Dommage que l’on ne puisse pas s’attacher autant à cette douloureuse Maria (Adèle Haenel, émouvante) dont on devine le désarroi et la difficulté de vivre. Face à ces 2 femmes, avouons-le, les hommes font plutôt pâle figure. Julien, le grand amour( ?) de Maria, n’est qu’une petite frappe sans envergure. Quant à Nicolas, le père, il est touchant de bonne volonté, mais il ne comprend pas grand-chose et a toujours une longueur de retard. Un rôle en or pour F. Damiens. Pas de doute, dans cet univers, l’homme n’est pas l’avenir de la femme. Si le cinéma français manque parfois de femmes qui en ont marre de vivre à l’ombre des hommes, ce film rétablit un certain équilibre de la balance. Avec talent !